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Interdiction de faire du bruit

Luttons contre les entraves au droit de manifester !

Les municipalités se dotent généralement de règlements sur le bruit afin de réduire autant que possible la pollution sonore, de contrôler le niveau et le type de bruits sur leur territoire et d’assurer un environnement paisible.

Ainsi, un règlement de la Ville de Montréal prohibe « le bruit de cris, de clameurs, de chants, d’altercations ou d’imprécations et toute autre forme de tapage » à l’extérieur. À Sherbrooke, un règlement interdit « de faire du bruit ou de causer du tumulte, notamment en criant, en hurlant, en chantant, en frappant sur des objets ou en utilisant tout objet reproducteur ou amplificateur de sons, dans une place publique, un endroit public, une place privée ou un endroit privé situé sur le territoire de la Ville ».

Les services de police remettent parfois des constats d’infraction en vertu de ces règlements en contexte de manifestation, par exemple à des personnes qui ont utilisé un mégaphone, scandé des slogans ou diffusé de la musique.

Le bruit et le droit de manifester

L’interdiction de faire du bruit, de crier, de chanter, de faire du tapage sur la voie publique porte atteinte à la liberté d’expression. Il va de soi que les expressions verbales, musicales, gestuelles ou autres lors de manifestations sont incluses dans cette liberté constitutionnelle.

C’est d’ailleurs la position de la Cour suprême. Dans une décision concernant le règlement montréalais sur le bruit, la Cour a jugé que le bruit dans l’espace public avait un contenu expressif protégé par la Charte canadienne (2952-1366 Québec Inc., 2005). De la même façon, la Cour municipale de Montréal a acquitté une membre du groupe Femen accusée de tapage sur la voie publique en précisant que l’expression vocale de ses messages devait bénéficier de la protection garantie par les chartes canadienne et québécoise (Topaloski, 2017).

Un.e manifestant.e joue du tambour
Crédit photo : Isabelle Lévesque

L’interdiction de faire du bruit en contexte de manifestation est-elle constitutionnelle ?

Les tribunaux ont décidé qu’en général, tout comme c’est le cas pour la règlementation sur l’affichage, les municipalités peuvent interdire raisonnablement de faire du bruit à l’extérieur pour lutter contre la pollution sonore (Bérubé, 2015). Ainsi, la Cour suprême a décidé que les villes pouvaient interdire le bruit « perturbateur », c’est-à-dire le bruit qui interfère avec l’utilisation et la jouissance paisibles de l’environnement urbain (2952-1366 Québec Inc., 2005).

Les tribunaux québécois ont toutefois mis en doute l’application du règlement montréalais sur le bruit en contexte de manifestations ou d’activités de piquetage (Reine Élizabeth, 2008).

Le but même de la manifestation ou du piquetage est de causer une certaine perturbation. Les slogans et les cris sont le propre d’une manifestation politique (Nelson, 2015). Les règlements sur le bruit ne doivent pas servir de prétexte pour faire taire les critiques et les opinions politiques des manifestant-e-s (Nelson, 2015).

La conclusion est toutefois différente si les manifestations ou le piquetage se déroulent non pas dans l’espace public, mais dans un lieu privé ou semi-privé comme un centre commercial (Bolduc-Marcotte, 2017). La qualification d’un lieu comme étant un endroit public ou non est complexe et ne fait pas l’unanimité, même chez les juristes.

Conclusion

| L’utilisation de règlements sur le bruit en contexte de manifestation porte atteinte à la liberté d’expression et au droit de manifester.

| La volonté collective de crier un message et de perturber est au cœur même de la notion de manifestation.

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