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Se défendre face à un constat d’infraction ou une accusation criminelle

Il est généralement préférable de mettre par écrit les détails de tout ce qui s’est passé durant la manifestation, soit avant, pendant et après l’intervention policière. Un délai important pourrait s’écouler entre cet événement et la date à laquelle vous serez entendu-e en cour pour contester votre constat d’infraction ou vous défendre contre une accusation criminelle. Il est possible que des détails essentiels à votre récit vous échappent des mois plus tard. Il est donc utile de noter le plus de détails possible : heure, lieu, déplacements, personnes présentes, descriptions physiques, mots entendus ou exprimés, etc.

Contester un constat d’infraction

La contestation d’un constat d’infraction n’est généralement pas couverte par l’aide juridique, c’est dire que vous ne pouvez pas être représenté-e gratuitement par un-e avocat-e rémunéré-e par l’État. Toutefois, lorsque c’est dans l’intérêt de la justice, compte tenu des circonstances exceptionnelles de l’affaire, notamment sa gravité ou sa complexité, l’aide juridique peut être accordée (Loi sur l’aide juridique, art. 4.5).

C’est parfois le cas lors d’une contestation constitutionnelle d’un règlement municipal portant sur les manifestations ou encore lorsqu’un procès pour un constat d’infraction s’annonce long et complexe. Si vous ne pouvez pas être représenté-e gratuitement par un-e avocat-e, il peut arriver qu’un-e avocat-e accepte de vous représenter pro bono (gratuitement).

En théorie, il faut contester par écrit son constat d’infraction dans les trente jours suivant sa réception. Toutefois, dans certaines villes où la cour est surchargée, on peut contester son constat tant qu’un-e juge ne nous a pas déclaré coupable, ce qui peut prendre des mois ou, dans certains cas, des années.

En effet, en l’absence d’un plaidoyer de culpabilité, le constat d’infraction est inscrit automatiquement pour audition à la cour municipale, mais vous ne serez pas avisé-e de la date. Vous serez alors presque inévitablement déclaré-e coupable et un avis vous sera envoyé par la poste. Pour savoir s’il est trop tard pour contester votre constat, vous pouvez appeler au greffe de la cour municipale concernée.

Pour contester, il faut inscrire un plaidoyer de « non-culpabilité » en cochant la case prévue à cet effet à l’endos du constat ou en l’écrivant à la main, puis le renvoyer à l’adresse indiquée. Certains constats d’infraction comportent une section dans laquelle la personne peut écrire sa version des faits. Il n’est pas obligatoire de la remplir : certaines personnes choisissent de ne pas le faire pour ne pas dévoiler d’avance leur défense.

Il est toutefois utile d’écrire « Je demande la divulgation de la preuve » pour obtenir le plus rapidement possible les documents que la poursuite détient, afin de pouvoir préparer votre défense. Bien souvent, ça consiste en un rapport d’événement rempli par le policier ou la policière lors de la remise du constat d’infraction.

 

 

Par la suite, la Cour enverra par la poste, à l’adresse indiquée au constat, un avis d’audition indiquant la date, l’heure et le lieu du procès. Si ce n’est pas encore reçu, il est possible de demander de nouveau la divulgation de la preuve. Sauf exception, le procès pour contester un constat d’infraction doit avoir lieu et prendre fin dans un délai de 18 mois maximum (Jordan ; Autorité des marchés financiers, para. 35).

Il est possible de se défendre devant la Cour municipale en contestant les faits de l’infraction. Au procès, il revient au ou à la procureur-e de la poursuite de faire la preuve de la culpabilité de la personne. Ceci implique qu’il ou elle doit démontrer chacun des éléments suivants : son identification, les circonstances de l’émission du constat d’infraction et la commission de l’acte reproché par la personne accusée.

La personne accusée peut présenter d’emblée une preuve en défense en soumettant des témoignages ou des preuves matérielles (par exemple des photos ou vidéos). Elle peut aussi choisir de réagir à la preuve présentée par la poursuite en attaquant la faiblesse de cette preuve. Ce sont des choix stratégiques qui dépendent des circonstances de l’affaire et des choix de l’accusé-e.

Il est possible pour la personne accusée de contre-interroger les policiers ou policières assigné-e-s par la poursuite. Si les policiers ou policières ne sont pas assigné-e-s par la poursuite, il faut demander leur assignation. Toutefois, si la contestation est perdue, il est possible que l’accusé-e doive payer leurs frais de comparution.

La défense face à une accusation criminelle

Si votre revenu est peu élevé, l’aide juridique permet généralement d’avoir accès à un-e avocat-e gratuitement (ou dans certains cas, sur contribution) pour vous défendre (Loi sur l’aide juridique, art. 4.5.). Par exemple, une personne seule peut être représentée gratuitement si son salaire annuel est inférieur à 23 843$. Puis, une contribution proportionnelle au salaire d’une valeur de 100$ à 800$ est demandée si la personne seule a un salaire annuel allant jusqu’à 33 304$ (Règlement sur l’aide juridique, articles 18 à 21).

Un-e accusé-e a le droit de se représenter seul-e. Il peut être utile de consulter un-e avocat-e et/ou d’obtenir le soutien de groupes de défense de droits. La personne accusée est libre de choisir l’avocat-e qui lui convient. Elle peut contacter le bureau d’aide juridique de sa région pour être référée à un-e avocat-e du réseau, ou trouver un-e avocat-e de pratique privée qui accepte les mandats d’aide juridique.

En raison des bas tarifs de rémunération, certain-e-s avocat-e-s de pratique privée n’acceptent pas les mandats d’aide juridique. Vous pourriez contacter les organismes et groupes de défense de droits de votre région pour obtenir des références d’avocat-e-s qui les acceptent.

Le mandat d’aide juridique peut être refusé pour diverses raisons, par exemple parce que vos revenus trop élevés, parce que l’infraction est mineure (comme l’attroupement illégal) ou parce que l’intérêt de la justice ne justifie pas un mandat pour contester un constat d’infraction. Si c’est le cas, vous avez un délai de 30 jours pour demander la révision de la décision. Des mandats d’abord refusés sont fréquemment accordés suite à une révision.

L’accusé-e a droit à la divulgation de la preuve amassée contre lui ou elle. Cette preuve peut comprendre des vidéos, des photos, des éléments matériels, des rapports policiers, etc. Elle sera reçue au début du processus et permettra d’élaborer la stratégie de défense.

Le procès doit avoir lieu dans un délai raisonnable. Selon l’accusation portée, le délai est de 18 à 30 mois maximum, sauf si c’est l’accusé-e qui demande plus de temps ou dans des circonstances exceptionnelles (Jordan). La durée du procès dépendra de la complexité de la cause et du nombre de témoins à entendre. Il est à noter que l’accusé-e pourrait avoir à se présenter à la Cour à plusieurs reprises dans le processus.

Il existe de nombreux moyens de défense spécifiques à certaines situations. En général, il s’agira de soulever un doute raisonnable quant à la question ultime à trancher : est-ce que la preuve démontre hors de tout doute raisonnable que l’accusé-e a commis l’infraction reprochée? Ainsi, s’il existe un doute dans l’esprit du juge, l’accusé-e doit être acquitté-e.

Ce sera d’abord le ou la procureur-e de la poursuite qui présentera sa preuve pour tenter de prouver que l’accusé-e est coupable. Puis, l’accusé-e peut attaquer la solidité de la preuve de la poursuite ou faire valoir sa défense, bien souvent par le biais de son avocat-e. Il ou elle n’a pas l’obligation de témoigner, ayant droit au silence jusqu’à la fin du processus judiciaire (Chambers).

Le ou la juge peut rendre le verdict de culpabilité ou de non-culpabilité sur place ou « prendre la cause en délibéré », c’est-à-dire rendre sa décision plusieurs semaines plus tard. En cas de culpabilité, le ou la juge décidera aussi de la peine qui sera imposée à l’accusé-e. Une partie ou l’ensemble du jugement pourra être portée en appel par la poursuite ou par la défense selon des critères précis.

Crédit photo : Patrick Sicotte

Contester la constitutionnalité d’une infraction pénale ou criminelle

Il est aussi possible de contester la validité constitutionnelle d’une disposition d’un règlement municipal ou du Code criminel en vertu duquel la personne est accusée. Il s’agira de plaider que cette disposition viole un droit protégé par la Charte canadienne des droits et libertés et/ou la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et que cette atteinte est déraisonnable et injustifiable dans notre société.

Dans un premier temps, la personne doit démontrer l’atteinte à ses droits constitutionnels, par exemple les libertés d’expression et de réunion pacifique (Big M Drug Mart). Quand cette preuve est faite, il revient au procureur ou à la procureure de convaincre le tribunal que cette atteinte est légitime et raisonnable (Oakes).

Pour ce faire, il lui faudra démontrer que la disposition contestée poursuit un objectif urgent et réel et que le moyen choisi, soit la disposition du règlement, est bien conçu pour atteindre cet objectif. L’atteinte doit être proportionnelle à l’objectif sociétal urgent, c’est à dire qu’elle doit porter le moins possible atteinte aux droits protégés par les chartes. C’est ce type de contestation qui a mené à la déclaration d’invalidité de l’article 500.1 du Code de la sécurité routière qui interdisait les entraves concertées à la circulation sur les routes provinciales (Garbeau).

Les articles des règlements des villes de Montréal (connu comme P-6) et de Québec (Règlement sur la paix et le bon ordre) rendant obligatoire la divulgation de l’itinéraire ou interdisant le port du masque ont aussi été jugés inconstitutionnels par la Cour d’appel (Villeneuve, 2018 ; Bérubé, 2019). Toutefois, les tentatives de faire invalider les infractions d’attroupement illégal ou d’émeute du Code criminel ont échoué à ce jour (Lecompte, Brien).


Une manifestante fait un signe de croix avec ses mains d'une air déterminé
Crédit photo : Coalition Fjord

 

Conclusion

| Il est possible de contester un constat d’infraction.

| L’aide juridique offre des services de représentation par avocat-e-s gratuitement pour les personnes faisant l’objet d’une accusation criminelle.

| Pour se défendre des accusations, il est possible d’attaquer la solidité de la preuve de la poursuite, de faire valoir sa défense ou de contester la validité constitutionnelle d’une disposition d’un règlement municipal ou du Code criminel.

Étape

En savoir plus

Éducaloi, La contestation d’une contravention

 

Guide, Petit guide pour t’occuper de tes tickets, Clinique Droits Devant, 2020

 

Guide, Les tickets au temps de la COVID-19 à Montréal, Clinique Droits Devant, 2020

 

 

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